Trace de lecture n°10: Les Fausses couches, Steph Rivard

Des extraits à l’arrache de mes lectures québécoises.

Le livre: Les Fausses couches

Auteur: Steph Rivard

Editeur: Ta Mère

Contexte de lecture: Métro ligne bleue, ligne orange, Brûlerie Saint-Denis

J’aime: la narration tantôt naïve et désenchantée, la créativité dans les images, l’intrigue qui tient autant de La vie devant soi d’Emile Ajar que du Grand cahier d’Agota Kristof

Les extraits:

Dans ma tour, j’invente les mots que je pourrai dire et les choix que je pourrai faire un jour. J’y suis l’adulte que je deviendrai une fois sorti de ma chrysalide qui sent le cercueil. Je m’accouche. J’ai une superbe vue. Je n’ai pas le vertige. Je suis un gratte-ciel. Je n’ai peur de rien. Chaque jour, dans ma forteresse de bois, en suspension entre les nuages cotonneux et la maison que je déteste plus souvent qu’à son tour, je suis une étoile épinglée sur le firmament horrifié de la rue des Oliviers.

***

Dans le ciel de mon impossibilité à être heureux, aujourd’hui, il s’est passé quelque chose de plus important que Lucille et Nick qui me donnent trop souvent le dégoût d’exister. Entre mon front et mes temps, je me suis parlé; j’ai catapulté des taupes dans les nuages pour qu’elles les détruisent; j’ai désappris pas mal de cris et je suis parti me réfugier dans ma tour, loin de tout. Enfin. Dans mes planches en bois à moi. Eloigné. Et j’ai gratté fort sur les milles-pattes qui voulaient me voler ma place.

Trace de lecture n°9: Sports et divertissements, Jean-Philippe Baril Guérard

Des extraits à l’arrache de mes lectures québécoises.

Le livre: Sports et divertissements

Auteur: Jean-Philippe Baril Guérard

Editeur: Ta Mère

Contexte de lecture: QG de Ta Mère

J’aime: les excès des personnages qui mènent à l’écoeurement, la justesse des dialogues, la narratrice “attachiante” , le portrait par l’excès (une fois de plus) de toute une génération, le cynisme qui ne se contente pas de l’ironie mais qui joue avec les frontières entre réalisme et caricature

L’extrait:

Les danseuses qui ont travaillé sur Félix reviennent danser ensemble, sur la scène. Une grande black. Gigantesque cul qui se tient. Magnifique. Mais le reste est triste. Le ventre. Aucune définition ni tonus. Les bras. Larges et mous. Des lignes floues. L’autres, petite, complètement baquaisse. Une bûcheronne. Une coureuse des bois. On l’imaginerait boulangère, derrière ses fourneaux, ou à brasser la soupe dans une chaumière humide d’Irlande pendant la crise de la patate. Mais certainement pas à essayer pitoyablement de faire gonfler le pénis d’un asexuel poli qui a fait semblant d’apprécier tout le long de la danse.

J’aurais ce qu’il faut pour être danseuse. Je suis plus ferme qu’elles dans bien des endroits, mon cul se tient, mes seins sont ronds et bien hauts (pour combien de temps encore, on ne le sait). Je serais une danseuse triple A. Oh qu’Echos Vedettes s’en régalerait. Une déchéance romantique. Une enfance d’or, un parcours enviable, désintégrés en cendres après des abus de drogues, d’alcool, d’hommes. Ils établiraient un lien de causalité entre mon enfance trop facile, mon entrée trop rapide dans le monde adulte, et ma déchéance inévitable. Ils diraient, après coup, que c’était évident, que ça pouvait pas finir autrement.

Trace de lecture n°8: Igor Grabonstine et le Shining, Mathieu Handfield

Des extraits à l’arrache de mes lectures québécoises.

Le livre: Igor Grabonstine et le Shining

Auteur: Mathieu Handfield

Editeur: Ta Mère

Contexte de lecture: QG de Ta Mère

J’aime: les rires puissants provoqués par cette lecture, le rythme de dessin animé, la narration pompeuse 

Les extraits:

Et Leon, déjà, traînait ses pieds jusqu’à la chaise, plus petite que celle de Stanley Kubrick, question de permettre au réalisateur de déposer son cendrier sur le crâne de son servile assistant, qui, désormais dépourvue de tout amour-propre, se laissait faire en se convaincant qu’il participait à la réalisation d’un chef-c’oeuvre et que d’avoir de la cendre dans le cuir chevelu était d’ailleurs excellent pour sa santé capillaire, ce qui s’avéra quelques années plus tard complètement faux, au dire de l’oncologue qui lui apprit son incurable cancer du cheveux. Il apprit également, encore quelques années plus tard, qu’il était impossible d’avoir un cancer du cheveu et que ledit oncologue était un charlatan qui lui avait fait subir un inutile et douloureux traitement de chimiothérapie, le dépossédant par la même occasion de plusieurs milliers de dollars que Leon aurait préféré investir dans un lit à baldaquin, dans un buste en marbre ou encore dans un dauphin domestique.

***

– Buvez un peu, il faut garder nos esprits.
– Tu as raison, Tensing, l’air commence à se faire rare. Et surtout, il ne faudrait pas qu’on égare notre petit drapeau, sinon, qui nous croira lorsqu’on dira que nous avons gravi l’Everest?

Et les deux hommes rirent de bon coeur, car nous étions en 1953 et, à cette époque, les blagues n’étaient pas encore drôles, alors on se contentait de ce qu’on avait.

Trace de lecture n°7: Dagaz, Stéphanie Pelletier

Des extraits à l’arrache de mes lectures québécoises.

Le livre: Dagaz

Auteur: Stéphanie Pelletier

Editeur: Leméac

Contexte de lecture: métro ligne bleue, mon lit, le canapé

J’aime: l’attention portée aux sensations, la tendresse qui soutient le récit et les personnages, le mystique dans le quotidien

L’extrait:

Je devrais peut-être m’arrêter ici. Me trouver un conifères aux branches assez denses pour nous protéger de la pluie. Tirer Chagall sous l’arbre avec moi et me coller contre lui en espérant lui soutirer un peu de chaleur. Mourir là ne me dérangerait pas tant que ça au fond. Je pourrais enfin me reposer. Chagall irait alerter Martin dès l’aube et le guiderait vers mon corps couché en boule sous l’arbre. Mon “amant” se jetterait sur moi en hurlant et pleurerait dans mon cou comme dans les films. Aux funérailles, il serait contraint de refouler sa peine, parce que notre amour est interdit et ignoré de tous. Je l’imagine effondré seul chez lui après le party de sandwichs pas de croûtes. J’en ai la gorge qui se serre.

Trace de lecture n°6: Testament, Vickie Gendreau

Des extraits à l’arrache de mes lectures québécoises.

Le livre: Testament

Auteur: Vickie Gendreau

Editeur: Le Quartanier

Contexte de lecture: le lit de la maison au bord du fleuve à Québec

J’aime: l’urgence de l’écriture, le bordel étourdissant, le pari formel 

L’extrait:

Je pensais que j’allais écrire ce livre et ne plus jamais revenir sur le sujet, sur le garçon. Tout est impératif maintenant dans ma vie. C’est probablement la dernière peine d’amour que je vis. Ça fait mal les dernières fois, c’est vulgaire la vie. J’aimerais au moins pouvoir chiller pendant quelques semaines dans la bibliothèque avec Genet Guyotat. Je ne vous casserai pas trop les oreilles. Mes histoires ne fonctionnent jamais. C’est pour ça que j’aime la poésie, c’est toujours infini. Les gens qui finissent leurs poèmes par un point, je m’en méfie.

Trace de lecture n°5: Oss, Audrée Wilhelmy

Des extraits à l’arrache de mes lectures québécoises.

Le livre: Oss

Auteur: Audrée Wilhelmy

Editeur: Leméac

Contexte de lecture: Toi, moi & café (boulevard Laurier)

J’aime: la rencontre du naïf et du glauque, l’univers de conte, l’ambiguïté du personnage principal, la violence qui s’installe et qui ne sera jamais résolue.

L’extrait:

Maintenant Lô est mort dans le feu et, pour peu qu’on retrouve son cadavre dans les décombres, il sera enseveli à côté de Grumme. Les flammes sont hautes encore dans le ciel. Noé fixe l’incendie: elle ne finira jamais dans un cercueil entre les deux vieux.

L’air de la grève refroidit quand on avance vers le large. La nuit est longue, pleine de fumée, les mouches ont déserté la plage: peut-être qu’il est trop tard et que les insectes aussi dorment quand il fait si noir.

Bon, pis alors, depuis le temps !

Alors voici :

Une terrasse dans le Petit Champlain, Québec:
Nous sommes trois, les récits se croisent à toute vitesse parce qu’il faut en profiter, on s’exclame, on s’énerve, on hurle de rire, on dit c’est pas possible, on s’accuse d’exagérer. Je vais recommander du vin, le serveur me propose de prendre directement une bouteille, pour le prix, l’attachée de presse surgit et souffle au serveur qu’on a peut-être déjà assez bu, je me gêne, je dis attendez je vais leur demander, l’attachée de presse glousse et dit mais non les filles je vous niaise, je dis que je vais quand même demander, pour la forme, le serveur acquiesce, je ne remarque pas qu’il se mord la joue, petit conciliabule à notre table, sur cette terrasse où il fait déjà nuit, nous décidons que nous ferons honneur à cette bouteille. Le serveur arrive quelques minutes plus tard, la bouteille déjà sur un plateau. Parfois on croit qu’on décide, alors que d’autres ont déjà décidé à notre place. Nous trinquons à cette bouteille qu’il ne faudrait pas boire et à toutes les situations qui ne seront pas démêlées ce soir. Le serveur reviendra une dizaine de minutes plus tard, pour soigner nos fesses, ce sont ses mots, avec six couvertures bienvenues. Fin de l’histoire : nous arrivons en retard au théâtre.

Une auberge, quelque part sur l’Île-Sainte-Hélène, Québec:
Mes parents et moi dans une voiture louée, je m’endors sur la banquette arrière, je ne vois rien du paysage, il est 14h. Rien n’est ouvert, rien, nulle part, rien à manger. Lorsque je me réveille, mes parents me disent que ça leur a rappelé le temps où je refusais de dormir, quand il fallait qu’ils m’emmènent pour des promenades en voiture afin que je trouve le sommeil. Et me voilà vingt-quatre ans plus tard, à me laisser balader par mes parents.

Le balcon d’un appartement à Frontenac, soirée jeu de rôle, Montréal:
Nous venons d’arriver, je suis l’inconnue, mais je ne suis pas la seule, je salue, je ne retiendrai pas les noms, de toutes façons dans quelques minutes nous allons tous nous entretuer. La partie a déjà commencé. Il fait très chaud. Nous sortons en attendant la prochaine. Elle dit je m’excuse mais je vais bitcher. Nous l’excusons, nous l’encourageons, nous gloussons bêtement.

Party d’Halloween, Frontenac, Montréal :
On me dit que j’aurai des compatriotes ce soir. On me dit Morgins, Yverdon, Vevey, par là. Je dis oui oui c’est mon coin ça. J’engage la conversation par inadvertance avec un de ces compatriotes. Il me demande pourquoi je n’ai pas cet accent bizarre qu’ont tous les gens qu’il rencontre depuis son arrivée. Je dis, sans rigoler, que c’est parce que je suis Suisse. Ah ! Il trouve Montréal très sympa, mais il faut trop marcher, en Suisse, il ne marche pas, il gare sa voiture juste devant la porte d’entrée, vingt minutes de trajet chez lui c’est Vevey-Yverdon, il le fait en voiture, il s’emmerde pas à marcher, ici il est allé jouer au poker dans une réserve, c’était malade, il était dans les dix derniers, l’assistance dit bravo, l’assistance québécoise pose des questions, le compatriote reprend chacune des phrases qui sont prononcées et rit très fort, pourquoi vous rajoutez des tu partout, vous êtes drôles, c’est ridicule. Je m’éclipse et glisse à Albertine que je m’excuse, je m’excuse d’avoir osé prétendre que les Suisses, en tant que francophones, ne faisaient pas comme ces Français qui se moquent de tout ce qui s’écarte de leur drôle de norme linguistique. J’affirme une évidence : quand on est con, on est con et puis voilà en fait. Albertine me dit ah mais tu vois c’est pour ça que toi on a envie que tu immigres!

Côte-des-Neiges, Montréal :
Trois colocs improvisés, émerveillés de se connaître si peu. Elle dit, les larmes aux yeux, qu’elle avait besoin de ce voyage, qu’elle est heureuse d’être là, avec nous, nous trinquons, nous nous connaissons si peu.

Métro, ligne bleue, Montréal :
Je remarque un peu tard que le vieux monsieur en face est en train de dessiner le portrait de la fille à côté de moi. Je jette des coups d’œil à la fille, je ne sais pas si elle sait, je ne sais pas si je dois lui dire. Alors je regarde le vieux pour qu’il sache que je sais. Et puis après je me dis que c’est pas un crime non plus. En sortant j’essaie de voir le portrait, mais le vieux l’a déjà déchiré et glissé dans sa poche.

Côte-des-Neiges, Montréal :
Il m’aide à préparer une soupe à la courge, nous sommes seuls dans l’appartement, les autres font du tourisme, nous parlons entreprises futures. La soupe est sur le feu, il s’en va pour prendre l’avion, sans avoir goûté la soupe, sans avoir pu dire au revoir à tout le monde.

Villeray, Montréal :
Deux camions rouges et la porte de l’appartement grande ouverte. J’attends dans le couloir, parce que ce n’est pas chez moi. Les pompiers me disent bonjour en inclinant la tête, silencieusement. Le plus massif des quatre dit que c’est pas du gaz mais que c’est toxique, étourdissements, vomissements, attention.
Elle explique, plus tard, que ça sentait les œufs pourris, qu’elle a cherché sur Google ce qu’il fallait faire quand ça sentait les œufs pourris et que Google disait d’appeler le 911.

Librairie Le Port-de-Tête, Montréal :
Elles ne sont pas encore arrivées, je les attends dehors, devant l’entrée. Trop de monde, trop de poésie, trop d’humidité. Je n’ai pas osé attraper un verre de rouge. Appuyée contre la vitrine, je joue à deviner qui va entrer ou non dans la librairie pour ce lancement de six recueils de poésie aux Herbes Rouges. Je pense que j’ai fait un score de 80%. Mais ce n’est qu’une estimation.

Villeray, Montréal :
Il y a un questionnaire de culture générale qui circule au Québec, tout le monde en parle. Le patron me dit de faire le test, pour voir. Il dit qu’il n’y a presque pas de questions sur le Québec. C’est faux. Un tiers, au moins. Bon. Le patron me dit qu’il a fait 78% et qu’il est dans le premier quartile. Je fais 58%, pas pire. Je suis aussi dans le premier quartile. Nous décidons que ça en dit plus sur les autres que sur moi.

J’ajoute que mon coloc a fait 92%.

Studio P, Québec :
Nous sommes quatre accoudées au bar. Je connais ces trois filles, elles ne se connaissent pas les unes les autres. La discussion est passionnée. Je dis que cette bande de copines est malheureusement virtuelle et le restera sans doute, mais que je suis très heureuse qu’elle ait pu exister, ne serait-ce que pour une petite demi-heure. Les trois approuvent.

Trace de lecture n°4

Des extraits à l’arrache de mes lectures québécoises.

Le livre: Partir de rien

Auteur: Maude Nepveu-Villeneuve

Editeur: Ta Mère

Contexte de lecture: île Sainte-Hélène, métro ligne bleue, frozen yogurt shop, le canapé

J’aime: la simplicité de la narration, les malaises dissimulés, les grandes aventures banalisées, la fin et l’éternité de la candeur, le mystère qui plâne, la violence extrême du début. 

L’extrait:

– Ok. Pourquoi est-ce que tout le monde est parti?

Elle est restée silencieuse un moment, puis elle m’a regardée, hésitante.

– Parce qu’ils vont construire un aéroport sur nos maisons?

J’ai hoché la tête, pensive. On ne savais pas exactement qui c’était, “ils”, mais on avait entendu ça à la radio avec papa et maman, et ma soeur aussi. Ça disait qu’ils allaient construire un aéroport près de chez nous parce que celui de la métropole n’arrivait plus à fournir: il y avait trop de gens qui voulaient venir dans notre pays, on avait besoin de plus d’avions. On avait d’abord pensé que c’était une blague, qu’il n’y avait pas tant de gens que ça qui voulaient venir dans notre pays, qu’en tout cas nous, on n’avait pas vu beaucoup d’étrangers dernièrement. Alors on s’était replongés dans notre souper et on avait oublié tout ça.

Dialogue inexistant

Elle a dit « y a des fuck you qui se perdent »

Il dit « quand tu vas te faire masser, faut que tu te demandes quelles sont tes priorités »

Elle dit « l’impro c’est plus drôle avec l’accent de Louis XIV »

Il dit « ce qui compte là-dedans c’est la communion, swiss cheese »

Elle dit « oui, je sais pourquoi le village a été déserté »

Il dit « en Suisse, vous n’aimez pas les minarets, c’est bien ça ? »

Elle dit « je sais pas où ça va, c’est pour ça que je ne veux pas en parler, mais ce qui est sûr c’est qu’il m’a fait du bien, il m’a prouvé que ça pouvait encore m’arriver, partager quelque chose de fort et d’authentique avec un homme, y a de l’espoir quoi, et ça je l’avais oublié »

Il dit « cette journaliste se croit maline parce qu’elle fait des trucs cons, en fait elle est juste vulgaire »

Elle dit « je t’ai déjà raconté l’histoire des deux sœurs qui fourraient avec deux autres sœurs ? »

Il dit « s’interroger sur la valeur morale des personnages d’un roman c’est débile, c’est comme si au lieu d’analyser le tour de magie tu te demandais si c’était moralement bien de couper une femme en deux »

Elle dit « j’ai un kick sur Ben de Parks and Rec, il est beaucoup trop cute »

Il dit « John Oliver ! Encore ! Encore ! Quand il ouvre la bouche c’est de la poésie qui en sort, man, c’est dingue. »

Elle dit « il faut trouver quelque chose de cruel à lui faire subir, il ne peut pas s’en sortir comme ça… oh je sais ! »

Il dit « tu penses qu’une fille qui te fait une page Wikipedia, en fait, elle veut coucher avec toi ? »

Elle dit « bon je crois que là j’ai pas mal fait le tour de tous les gars que j’ai frenché, vous savez tout »

Il dit « ce soir j’arrête pas de me tromper et de dire “homosexuel” à la place de “intellectuel” »

Elle dit « c’est décidé, à partir de maintenant on t’appelle swiss cheese »

Trace de lecture n°3

Des extraits à l’arrache de mes lectures québécoises.

Le livre: Ménageries

Auteur: Jean-Philippe Baril Guérard

Editeur: Ta Mère

Contexte: un chalet de luxe à Magog

J’aime: le rire et le dégoût que provoquent ces nouvelles, l’oralité, les illustrations de Ben Tardif, les animaux malsains

L’extrait:

Est-ce que j’ai le mot “conne” écrit dans le front?

Je le sais que je suis pas très belle, pis que je suis pas, disons, la fille la plus excitante en ville. Je le sais que, vu que je suis célibataire depuis trois ans, je mérite pas de traitement royal, mais y a toujours ben des limites!

Si jamais je le revois, je vais lui arracher les testicules avec mes dents. Quand y va être mort, je vais chier sur sa tombe.

Dire que pour lui, j’ai pris un bain de minuit dans la Yamaska. Un bain de minuit dans la Yamaska!

Laissez-moi vous expliquer avant de me juger, voulez-vous?

Ça commence avec un homme, parce que ça commence toujours avec un homme. Je rencontre le gars sur Internet, sur un site de rencontre. Je sais que dit comme ça, ça peut avoir l’air loser, mais y’a l’air potable, le gars! Pas con, pas laid, toute le kit.

Bon, en fait, j’aurais pu me trouver mieux, mais je m’étais donné Noël comme date butoir pour trouver un père, ou plutôt un géniteur, à mes enfants, pis on était rendus à la fin novembre, ce qui faisait que j’avais pas de temps à perdre.